dimanche 14 septembre 2008

PEINTURE (1) – L’expressionnisme allemand, des états d’âme sur une toile



(Mon séjour chez Le petit Journal de Berlin est maintenant terminé, une page s'est tournée, une autre est en train de s'écrire à Strasbourg! A vous qui n'avez peut être pas pu lire tous les articles publiés sur le site du journal, voici une sélection de mes articles "coups de coeur"! Bonne lecture!)



Cet été, deux musées berlinois consacrent leurs expositions à la peinture expressionniste allemande. L’occasion de revenir sur un des plus grands mouvements artistiques de l’Allemagne. Et de découvrir un de ses maîtres.



Début du XXème siècle. Le nationalisme gronde, la guerre se fait proche. La psychanalyse apparaît, on extériorise ses angoisses. Alors que la photographie se perfectionne, l’art pictural perd sa fonction privilégiée de reproduction objective de la réalité. Les artistes d’Europe du Nord se tournent vers la projection de leur subjectivité. L’expressionnisme voit le jour.


S’affranchir des normes, délivrer ses émotions
Josef Scharl : Straβenszene (1930) http://www.expressionale.de/

Fini l’impressionnisme français de Cézanne et Renoir qui s’attache à décrire la réalité physique des choses. Finies les reproductions impeccables de paysages du naturalisme. Détruire les vieilles conventions : tel est le mot d’ordre des premiers expressionnistes allemands. L’artiste doit donner libre cours à son inspiration. Sa toile devient le lieu de l’épanchement de ses émotions. Une scène de rue, un rire, un visage, un corps nu : la simplicité est de retour, l’individu au centre de l’attention. Les peintres allemands tournent le dos à l’industrialisation et se dressent contre l’académisme de la société. Point de perspective dans leurs œuvres mais des lignes acérées et des couleurs criardes. En somme, une peinture agressive pour atteindre la plus grande intensité expressive. Un art qui sera qualifié de « dégénéré » par les nazis. L’arrivée d’Hitler au pouvoir en 1933 marque la fin de l’expressionnisme allemand. De nombreuses œuvres sont détruites ou brûlées, les artistes s’exilent ou se suicident.


Ernst-Ludwig Kirchner, pionnier de l’expressionnisme allemand

Amerikanische Tanzpaar, 1910/1911

En 1905, Kirchner fonde avec trois autres peintres le mouvement « Die Brücke » (le pont). Leur mot d’ordre : s’affranchir du style académique et ouvrir de nouveaux chemins dans l’expression artistique. A l’occasion des 70 ans de la mort de l’artiste, qui s’est suicidé en 1938, ne supportant plus de voir qu’on assassine son œuvre sous ses yeux, le « Brücke-Museum » de Dahlem lui rend hommage par trois expositions en 2008 et 2009. La première, « Meisterblätter », présente une centaine de ses œuvres. Griffonnées au crayon de mine ou à la craie, ses dessins sont le miroir de ses émotions. Le fond prime sur la forme. Quelques traits suffisent, qu’ils soient fins à l’encre de chine ou gras au charbon, les formes prennent vie : le rebord d’une fenêtre, le sommet d’une montagne, un sein rond, un entrejambe. Kirchner croque aussi bien les villes de Dresden et Berlin et les montagnes de Suisse que ses concitoyens bourgeois. A l’honneur : la beauté féminine. Seules ou en couples, les femmes sont nues sur des tableaux dénudés. Le vide a sa place dans ces portraits où la simplicité est de mise. Des couleurs acides viennent parfois embellir le tout. Ici, un fond vert turquoise. Là, une ligne orangée et un gribouillage rouge. « Kircher dessine comme d’autres écriraient » affirme l’artiste lui-même. Ses toiles sont le reflet de son vécu et de ses sentiments. Et nous inspirent à notre tour de l’émotion.

Ernst Ludwig Kirchner, Paar, 1908



Cécile Leclerc (www.lepetitjournal.com/berlin.html)

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