B-E-R-L-I-N: six lettres, deux syllabes, une réaction: son coeur se met à battre.
Hommage.
Berlin : je ne connaissais pas grand-chose sur cette ville dont je suis vite tombée amoureuse. Son histoire m’a passionnée : lieu de toutes les tragédies allemandes du XXème, de nombreux quartiers témoignent de son passé. Le feu de la Potsdamer Platz rappelle que cette place était le centre des Années Folles, les rares vieilles bâtisses laissent imaginer la période prussienne… Car Berlin paraît jeune, neuve, sans histoire avant la fin de la seconde guerre mondiale. Tout a été détruit : ne restent que les endroits connus (ici devait être le Bunker d’Hitler ; ici était situé le château prussien ; …). Le musée de l’histoire de l’Allemagne témoigne de ce passé, les films des Alliés montrent Berlin à nu, en ruines, à l’heure « Zéro » (« Stunde Null »). L’Unter den Linden n’est en fait qu’une reconstitution (de grands bâtiments blancs imposants) et ça se sent.
Mais avant toute chose, Berlin est le miroir de la partition de l’Allemagne : deux villes en une. Dix-sept ans après, cette division est toujours perceptible. Deux centre-ville (Zoologischer Garten et Alexander Platz), deux gares principales (Zoologischer Garten et Ostbahnhof), trois opéras (deux à l’Est, un à l’Ouest)… Deux villes séparées par une frontière naturelle : le grand parc de Tiergarten, qui amplifie la scission. Des bouts du mur sont encore visibles ici ou là. Cependant, ils se font rares : Berlin et l’Allemagne souhaitent tourner la page et aller de l’avant. En ce sens, la nouvelle grande gare Hauptbahnhof construite en 2006 est située entre les deux centres, non loin du nouveau quartier politique également très symbolique puisque les bâtiments engendrent les rives Ouest et Est de la Spree, ancienne frontière naturelle. La Potsdamer Platz témoigne de ce désir : un quartier high-tech avec de hauts building se dresse sur l’ancien No Man’s Land.
Berlin me semble osciller entre passé et avenir et c’est ce qui fait tout son charme. Les rues ont traversé les périodes sombres de l’histoire : l’actuel Ministère des Finances est situé dans un bâtiment hitlérien, étant par la suite le siège de « la maison des Ministères » (haute instance) sous la RDA. Le récent mémorial de la Shoah illustre également le désir de ne pas oublier, tout comme celui de se tourner vers demain grâce à son architecture « moderne ».
C’est donc dans une ville moderne, pleine de ressources, riche historiquement parlant que j’ai établi refuge. Toutefois, la fracture Est-Ouest est encore perceptible dans l’architecture communiste typique de l’Est et dans le bas coût de la vie (loyers, denrées,..) : pas étonnant que la plupart des étudiants s’installent à l’Est. Toutes les blessures ne sont pas refermées : le vent d’Ost-algie soufflant sur les « nouveaux Länder » se fait entendre à Berlin. Les jeunes ne se différencient plus (on est européen avant tout, puis allemand), mais je perçois tout de même une certaine fierté des jeunes originaires de RDA. Mes amitiés nouées ont permis de m’en rendre compte : ils n’ont pas vécu la même histoire, et considèrent la réunification comme une absorption de la RDA par la RFA plus que comme la création d’un nouvel Etat. Cela se ressent d’autant plus chez les « plus âgés » (grand-parents d’amis). D’ailleurs, à Berlin, on est fier d’avoir son Ampelmann (feu de signalisation routière différent et typique de l’Est), même si celui-ci est vite devenu objet de consommation touristique.
Berlin est surprenante par sa taille. On dit qu’elle équivaut à neuf fois Paris intra-muros. Cela accentue la séparation de la ville. Habitant à l’Est, je devais compter sur une heure de transport en commun pour me rendre à l’Ouest pour mon stage. U-Bahn (métro), S-Bahn (entre train, RER et métro aérien), bus, tramway (typique de l’Est !! ils se font rare à l’Ouest) : à Berlin, tout est loin ! Impossible de se promener à pied si l’on veut être à l’heure. Du coup, les Berlinois ont trouvé une solution efficace : le vélo !! Dès les premiers rayons de soleil perceptibles au printemps, les deux-roues envahissent les rues. Des voies leur sont bien entendu exclusivement réservées. D’ailleurs, tous les étudiants ont leur vélo acheté à très bas prix au marché aux puces du coin. Et l’été, c’est un bonheur de déambuler le long des lacs berlinois, dans ses forêts … Car Berlin est la capitale la plus verte d’Europe : chaque quartier a son parc, le centre est envahi par Tiergarten, et les environs regorgent de forêts et de lacs. L’été, les berlinois transportent leurs barbecues et pique-niquent dans les parcs, avant de faire une petite plonge (nue le plus souvent : nous sommes à l’Est, point de pudeur) dans un lac. C’est de mise.
Berlin m’a également séduite par sa richesse culturelle : plus d’une centaine de musées tous aussi enrichissants les uns que les autres, opéras, théâtres, Philharmonie, cinémas en plein air et en version originale,… Ce monde de la culture tend les bras aux étudiants : possibilités d’avoir des tickets au dernier moment à 8 euros pour une pièce de théâtre ; musées nationaux gratuits tous les jeudis ; place d’opéra à 10 euros une heure avant la représentation….en étant située au premier rang !! La mairie a mis en place une politique de démocratisation culturelle auprès des jeunes et ça marche. Par ailleurs, j’ai eu la chance d’assister au festival de cinéma de la Berlinale en février 2007. Au-delà de la sélection officielle, j’ai pu découvrir d’autres films présentés pour l’occasion. J’ai cependant trouvé que ce festival n’émeut pas les foules berlinoises, il dépasse largement le cadre local et rassemble plutôt les amateurs cinématographiques du monde entier.
Berlin est avant tout la capitale politique de l’Allemagne réunifiée : son quartier politique aux bâtiments modernes transparents situé sur les deux rives de la Spree est un monde à part. Pour mon plus grand intérêt, Berlin a joué un rôle primordial en ce début d’année 2007 : à la fois présidente du G8 et présidente du Conseil Européen. J’ai d’ailleurs eu l’honneur de participer à l’Europafest de mars 2007 célébrant les cinquante ans des Traités de Rome. Vivre au cœur de la capitale allemande m’a permis de m’intéresser de plus près à l’actualité politique du pays, notamment par la lecture de l’hebdomadaire Der Spiegel.
Enfin, vivre à Berlin signifie vivre dans une ville allemande, vivre « à l’allemande ». Je connaissais les habitudes alimentaires des allemands : petit déjeuner à la hâte le matin, parfois un petit encas vers 11h, un petit plat pour le déjeuner à n’importe quelle heure (entre 12h et 15/16h), Abendbrot à partir de 18h (point de repas, mais de la charcuterie, fromage et autres sur du pain). En Allemagne, on mange dès lors que l’on a faim. Je me suis rapidement fait à ce rythme, notamment en délectant les diverses sortes de Brötchen (petits pains) aussi bien au pavot, aux noix, aux graines de tournesol, aux graines de citrouille,…. Si un petit creux se fait sentir, les allemands n’hésitent pas à sauter sur les Bretzel (délicieuse pâte de brioche salée) ou sur la spécialité berlinoise : la Curry Wurst, soit la traditionnelle saucisse allemande mais à la sauce curry. De nombreux marchands déambulent les rues avec leurs barbecues en ceinture et en vendent aux passants affamés. Lors des repas « de fête », il est de coutume de manger un bon plat vers midi, de faire une pause, et de reprendre du gâteau vers 16h avec du café (café au lait ou à la crème). Les gâteaux allemands sont succulents (au fromage blanc, aux fruits,..) mais toujours bien lourds. J’ai réussi à obtenir quelques recettes secrètes des grand-mères ! Enfin, les allemands sont de vrais buveurs de bière (il ne s’agit pas d’un cliché). Ils peuvent en avaler un certain nombre à la suite. J’ai moi-même appris à différencier les bières des différents Länder.
Mais les coutumes alimentaires ne sont pas un critère descriptif suffisant. Vivre en Allemagne un an m’a permis de constater que les allemands ont un sens civique plus développé que le nôtre. En témoigne le tri sélectif systématique entré dans les mœurs : nous avions quatre poubelles dans notre cuisine (une pour le papier, une pour le verre, une pour les points jaunes, une pour les détritus). On trouve même ces poubelles dans les lieux publics. De plus, presque toutes les bouteilles de verre et de plastique sont consignées. Il est d’usage de payer une bouteille de bière à un prix plus élevé, de la conserver, et de la ramener dans un magasin afin de récupérer une caution. Tous les supermarchés sont équipés de ce genre de machine. Là encore, une idée à creuser et à exporter chez nous… Cela dit, Berlin n’est pas la ville la plus représentative de la conscience écologique des allemands. Des progrès sont encore à réaliser (concernant la propreté des rues par exemple).
Berlin est avant tout la capitale politique de l’Allemagne réunifiée : son quartier politique aux bâtiments modernes transparents situé sur les deux rives de la Spree est un monde à part. Pour mon plus grand intérêt, Berlin a joué un rôle primordial en ce début d’année 2007 : à la fois présidente du G8 et présidente du Conseil Européen. J’ai d’ailleurs eu l’honneur de participer à l’Europafest de mars 2007 célébrant les cinquante ans des Traités de Rome. Vivre au cœur de la capitale allemande m’a permis de m’intéresser de plus près à l’actualité politique du pays, notamment par la lecture de l’hebdomadaire Der Spiegel.
Enfin, vivre à Berlin signifie vivre dans une ville allemande, vivre « à l’allemande ». Je connaissais les habitudes alimentaires des allemands : petit déjeuner à la hâte le matin, parfois un petit encas vers 11h, un petit plat pour le déjeuner à n’importe quelle heure (entre 12h et 15/16h), Abendbrot à partir de 18h (point de repas, mais de la charcuterie, fromage et autres sur du pain). En Allemagne, on mange dès lors que l’on a faim. Je me suis rapidement fait à ce rythme, notamment en délectant les diverses sortes de Brötchen (petits pains) aussi bien au pavot, aux noix, aux graines de tournesol, aux graines de citrouille,…. Si un petit creux se fait sentir, les allemands n’hésitent pas à sauter sur les Bretzel (délicieuse pâte de brioche salée) ou sur la spécialité berlinoise : la Curry Wurst, soit la traditionnelle saucisse allemande mais à la sauce curry. De nombreux marchands déambulent les rues avec leurs barbecues en ceinture et en vendent aux passants affamés. Lors des repas « de fête », il est de coutume de manger un bon plat vers midi, de faire une pause, et de reprendre du gâteau vers 16h avec du café (café au lait ou à la crème). Les gâteaux allemands sont succulents (au fromage blanc, aux fruits,..) mais toujours bien lourds. J’ai réussi à obtenir quelques recettes secrètes des grand-mères ! Enfin, les allemands sont de vrais buveurs de bière (il ne s’agit pas d’un cliché). Ils peuvent en avaler un certain nombre à la suite. J’ai moi-même appris à différencier les bières des différents Länder.
Mais les coutumes alimentaires ne sont pas un critère descriptif suffisant. Vivre en Allemagne un an m’a permis de constater que les allemands ont un sens civique plus développé que le nôtre. En témoigne le tri sélectif systématique entré dans les mœurs : nous avions quatre poubelles dans notre cuisine (une pour le papier, une pour le verre, une pour les points jaunes, une pour les détritus). On trouve même ces poubelles dans les lieux publics. De plus, presque toutes les bouteilles de verre et de plastique sont consignées. Il est d’usage de payer une bouteille de bière à un prix plus élevé, de la conserver, et de la ramener dans un magasin afin de récupérer une caution. Tous les supermarchés sont équipés de ce genre de machine. Là encore, une idée à creuser et à exporter chez nous… Cela dit, Berlin n’est pas la ville la plus représentative de la conscience écologique des allemands. Des progrès sont encore à réaliser (concernant la propreté des rues par exemple).
Par ailleurs, même s’il est vrai que les allemands sont ponctuels, aimant les règles et directs, il est faux d’affirmer qu’ils sont enfermés dans ce carcan de la règle. Au contraire, ils font preuve de souplesse et sont très ouverts (en témoigne par exemple leur impudeur dans les vestiaires des douches de piscine : alors qu’en France, il est de rigueur de garder son maillot de bain, en Allemagne, point de complexe !). Je dirais plutôt qu’ils aiment la mesure et sont très autonomes (comme on leur a appris très tôt, ce qui se ressent d’ailleurs à la faculté dans leurs réflexions). A la suite de la philosophie de Kant… Mais je n’aime pas brosser le portrait de « nationalités ». Chacun est unique, tout le monde est différent. Surtout à Berlin, capitale multiculturelle. Le quartier de Kreuzberg en est illustrateur : turcs, émigrés de l’Est, artistes, étudiants, punks,… C’est un quartier «salade niçoise ». J’aime Berlin pour cette tolérance et cette « multiculturalité ».
Enfin, rester une année en Allemagne a été pour moi l’occasion de vivre les différentes fêtes annuelles. Le 3 octobre (fête nationale célébrant la réunification de 1990) m’a d’abord paru comme un banal jour férié, sans travail. En effet, les allemands sont beaucoup plus attachés au 9 novembre, jour de la chute du mur. Malheureusement, cette date a d’autres événements tragiques (abdication de d’Empereur en 1918, putsch d’Hitler en 1923 et nuit de cristal en 1938). Les fêtes populaires sont les plus importantes. La Saint-Nicolas le 6 décembre permet d’entrer dans cette période magique de l’Avent. Nombreux sont les marchés de Noël dans Berlin. Malheureusement, le charme d’antan a laissé place à la société de consommation… J’ai eu la chance de boire le Feuerzangenbowle chez des amis lors de cette période de l’Avent (boisson traditionnelle à base de rhum à faire cuire au dessus d’une cocotte minute). Pâques est une date également importante : en Allemagne, le lapin apporte les œufs. Aussi, chaque maison possède un arbre ou une plante décoré(e) d’œufs peints en attendant le Jour J. Enfin, le 1er mai, fête du travail, a été récupéré par les mouvements anarchistes et extrème-gauche pour faire entendre leurs voix.
Dix mois. Près de 300 jours. J’ai tellement vécu, découvert, appris, rencontré, visité et aimé lors de ce séjour. Je suis devenue Berlinoise. Et c’est le cœur gros que j’ai quitté la capitale allemande…
Dix mois. Près de 300 jours. J’ai tellement vécu, découvert, appris, rencontré, visité et aimé lors de ce séjour. Je suis devenue Berlinoise. Et c’est le cœur gros que j’ai quitté la capitale allemande…
« Die Berliner sind unfreundlich und rücksichtslos, ruppig und rechthaberisch, Berlin ist abstoβend, laut, dreckig und grau, Baustellen und verstopfte Straβen wo man geht und steht – aber mir tun alle Menschen leid, die hier nicht leben können ! »
Anneliese Bödecker
« Les Berlinois sont antipathiques, sans égards pour autrui et grossiers. Ils aiment avoir le dernier mot ; Berlin est repoussant, bruyant, sale et gris ; à chaque coin de rue, il y a des travaux, les rues sont bouchonnées – pourtant, je plains tous les gens qui n’ont pas la chance de vivre ici ! »